dimanche 10 novembre 2013

Achéens et Troyens

Je constate qu'il est peu probable que l'epsilon de Delphes désigne les Hellènes. Ce n'est qu'à partir du VIe siècle av. J.-C. qu'ils ont commencé à se nommer ainsi. Pour Homère, l'Hellade n'est qu'une partie de la Thessalie. Il note que la région est « calligyne », riche en belles femmes.
Quant aux Grecs, il les appelle généralement Achéens ou Danaens. Ils s'entendent parfaitement avec les Troyens, je veux dire qu'ils parlent vraisemblablement la même langue. On ne voit intervenir à aucun moment des interprètes. Les négociations entre Achéens et Troyens se font en grec, et c'est encore en grec qu’Hélène converse avec Pâris et Priam. Le poète fait remarquer que certains parmi les alliés des Troyens s'expriment dans une langue barbare. Si les Troyens eux-mêmes étaient « barbarophones », il ne fait pas de doute qu'il nous le dirait. J'avoue que j'ai été assez surpris en découvrant qu'Hector et ses compagnons parlaient le grec. Mes professeurs décrivaient systématiquement les ennemis des Hellènes comme des êtres cruels et incultes.
Les Troyens n'étaient donc pas tout à fait des étrangers comme je le croyais, ils bénéficient d'ailleurs du soutien d'Apollon. Aphrodite, elle, accorde son appui à la belle Hélène. Quant à Zeus, il hésite, il a du mal à choisir entre les Grecs et les Troyens, il laisse les belligérants se débrouiller tout seuls.
Vassilis ALEXAKIS, La Langue maternelle, Fayard, 1995